La Ferrade


« On se chauffait devant, on se gelait derrière. »

J’avais quatre ans quand je suis arrivée à Bègles, en 1930, avec mes parents et mon frère. Nous étions locataires 72 cours Victor Hugo, dans le quartier La Ferrade. Nous avions une maison à étage avec un grand jardin. Il y avait quatre chambres, une en bas pour ma grand-mère et trois en haut, une cuisine et une souillarde. Les toilettes étaient dans le jardin, comme partout dans Bègles à cette époque-là, ce qui permettait d’avoir du fumier pour le jardin.
Il n’y avait pas beaucoup de modernité à la maison mais c’était une période heureuse. J’en garde un excellent souvenir. On s’éclairait avec des lampes à pétrole et des bougies. On a eu l’électricité quand j’ai passé le certificat d’études, vers 1940. Nous avions une cheminée en bas mais il n’y avait qu’un poêle à pétrole pour chauffer les chambres. Nous étions bien couverts.
Nous avions des animaux dont s’occupait ma grand-mère : poules, lapins, canards – les canards, c’est l’horreur, c’est sale – des pigeons et des chats(Annie Réglat)










« C’était la conversation qui était très importante. »

Je me rappelle du voisinage et de la très bonne entente entre les voisins. Ce n’était pas une vie de village, pas même une vie de ville : c’était une vie de quartier, de quartier populaire : tout le monde se parlait, donnait ses idées… On ne s’invitait pas entre voisins. Ça ne se faisait pas. C’était la conversation qui était très importante.
            Ce coin du cours Victor Hugo, à La Ferrade, était très vivant. Près de chez moi, il y avait d’un côté l’épicerie de Madame Franiau, la mère de mon ami d’enfance, chez qui on trouvait des graines et du fourrage pour les bêtes – à cette époque-là, il y avait très peu de voitures, les gens circulaient beaucoup à cheval –  et de l’autre côté, au numéro 74, la quincaillerie Victor. En face de la maison, on avait le boucher, Monsieur Maître, le trottoir suivant, c’était le charcutier, Oréteguy, ensuite l’épicerie Senz et le marchand de vin, Andribet.  Nous avions également deux poissonniers.

            Notre matelassière habitait rue Salengro, à Bègles, et venait chercher le matelas ou le sommier qu’elle faisait ensuite chez elle, des matelas en laine. On était bien dessus et ça tenait chaud. Cette dame travaillait très bien. Elle est devenue ensuite une très bonne amie de maman. Le ramoneur, il fallait le commander pour tous les ans. (Annie Réglat)


Le cours Victor Hugo, secteur la Ferrade, au début du XXe siècle.

Le cours Victor Hugo, secteur la Ferrade, au début du XXe siècle. Sortie des ouvriers de la manufacture dʼallumettes.











Vue actuelle des bâtiments de lʼancienne épicerie Senz et de lʼancien magasin de vin Andribet, 55 et 53 Cours Victor Hugo.














Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire